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Léo-Paul Lauzon, éveilleur de consciences

par
Collaboratrice de Tolerance.ca®
Photo : F. David
Ami de Michel Chartrand, d’Armand Vaillancourt et d’autres grands contestataires québécois, Léo-Paul Lauzon dérange par ses prises de position virulentes, sa notoriété grandissante et son allure anti-conformiste. Mal rasé, sans veste ni cravate, adepte des jeans et des baskets, Léo-Paul Lauzon adopte une allure peu orthodoxe pour un comptable agréé, détenteur, de surcroît, d’un MBA de l’École des hautes études commerciales de Montréal et d'un doctorat en sciences de la gestion de l’Université de Grenoble.

Unique en son genre, le professeur Lauzon a toutefois prouvé que l’on pouvait être pris au sérieux sans avoir l’allure du parfait gestionnaire. Invité de toutes les émissions de radio et de télévision du Québec, publié dans plusieurs journaux de gauche, ce libre-penseur, que l’on cite et que l’on consulte constamment, a publié plusieurs ouvrages d’analyse et de réflexion, dont Contes et comptes du Prof Lauzon - Le néo-libéralisme dénoncé net, fret, sec ! , en 1991.

Regroupant les chroniques qu’il a publiées aux cours des dernières années, ce livre s’est mérité les éloges de plusieurs critiques, notamment de Louis Cornellier, du quotidien Le Devoir, qui a déclaré que Lauzon, malgré « son ironie mordante » reste « un homme d’espoir et d’engagement » dont la « parole mobilisatrice » « fouette le sang » et « invite à inventer (…) un espace économique » permettant d’assurer aux hommes et aux femmes d’ici leur dignité.


La tolérance ?

Si l’on fait un lien avec l’économie, la tolérance se fait avec des outils collectifs, des programmes sociaux. Comment peut-il y avoir de la tolérance sans un état digne de ce nom ? Le premier ministre du Québec, Jean Charest, prêche la liberté individuelle. Tout est axé sur l’individualisme. Or, il ne peut y avoir de tolérance, s’il n’y a pas des programmes sociaux dignes de ce nom. Même accepter qu’il y ait des guignolées et des téléthons sont des preuves d’intolérance. Tous ces programmes de charité ne devraient pas exister. Avec un gouvernement socialiste, il n’y aurait même plus de guignolées ni de téléthons.

Léo-Paul Lauzon

Il m’a fixé rendez-vous dans son humble demeure des Laurentides, située sur une presqu’île au nord de Montréal, à l’abri des remous de la ville. Lorsqu’il n’est pas dans sa salle cours de l’Université du Québec à Montréal, où il est professeur au département des sciences comptables, Léo-Paul Lauzon y consacre son temps à la lecture, à l’écriture et au sport. Muni de son cigare et entouré des journaux qu’il épluche page par page, Lauzon trie, découpe, et se met à contester passionnément les abus des politiciens.


La coqueluche des médias

« Tant que je m’intéressais aux petits investisseurs, j’étais la coqueluche des médias, m’avoue-t-il. Mais quand j’ai commencé à parler des problèmes économiques et sociaux, de façon plus globale, et à m’étaler sur la répartition de la richesse, j’ai été barré partout, sauf dans les journaux indépendants qui ont une plus grande ouverture d’esprit. »

Le problème viendrait surtout de la concentration de la presse, les grands médias étant détenus par les multinationales.

« En France, on nous présente l’information de façon différente avec Le Canard enchaîné, Charlie Hebdo, le Monde diplomatique ou Libération. Ici, nous sommes « brain-washés » ! », s’exclame-t-il.

Ses études fouillées et son discours progressiste de grand économiste l’ont conduit à créer, en 1996, la Chaire d'études socio-économiques de l'Université du Québec à Montréal. Son objectif, affirme Lauzon, est de relancer le vrai débat politique en proposant des solutions concrètes, dans le but de démystifier certains sophismes et mensonges qui ont cours chez nos gouvernements et leurs spécialistes en économie.

La Chaire effectue des recherches dans des domaines qui sont peu scrutés, comme celui de la privatisation des sociétés d’État. Elle forme également des chercheurs en s’efforçant de les doter d’une sensibilité sociale.

S’il est vrai que Lauzon dérange les politiciens et les grands chefs d’entreprise, il reçoit, en revanche, l’appui des petits travailleurs.


« …avoir de la passion pour autrui »

« J’essaie d’avoir la passion de la compassion. La passion, ça ne vaut rien. Il y en a qui ont la passion de leur petite famille ou celle de leur job. Moi, ça m’écœure de voir ce monde-là. Il faut avoir de la passion pour autrui. Quand je vois des itinérants où des gens qui ont des gros problèmes, ça me touche. Ce sont nos frères et nos sœurs », déclare Lauzon, qui collabore en outre au journal L’Itinéraire, magazine produit et vendu par des personnes vivant l’itinérance, dont le tirage atteint maintenant prés de 20 000 exemplaires.

La préface de Contes et comptes du Prof Lauzon a été signée par Jean Lapierre, président du Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, ce qui n’a pas été sans provoquer de remous.

« Les cols bleus sont des commis de l’État, rappelle Lauzon. Arrêtons de les diaboliser! Est-ce un crime s’ils gagnent 40 000 $ ? Pour baisser les taxes, va-t-il falloir encore s’en prendre aux travailleurs ? On appauvrit le monde ordinaire, toujours vers le bas. C’est drôle, dans les entreprises ou dans la fonction publique, les travailleurs ordinaires sont toujours trop payés, ironise-t-il. Mais avez-vous vu le discours que tiennent les politiciens pour recruter des présidents à la Société des alcools du Québec ou à l’Hydro-Québec ? Pour ces derniers, 200 000 $ à 300 000 $ de salaire, ce n’est pas assez. Il faut leur payer des Jaguars en plus. On voit bien qu’on est dans une société divisée en deux! »

Lors des nombreuses croisades qu’il entreprend pour trouver une solution aux problèmes sociaux et économiques, Léo-Paul Lauzon dénonce la privatisation des entreprises et la sous-traitance.

« Autrefois, c’était la Société canadienne des postes qui livrait les circulaires. Maintenant, on a donné ce contrat à l’entreprise privée et les employés ne sont même pas payés 5 $ de l’heure. On voit aussi les conditions de la sous-traitance dans le ramassage des ordures à Montréal. Les gars courent après le truck en en échappant la moitié et ils ne sont même pas payés le salaire minimum. Dans dix ans, ils vont être crevés ces gens-là ! »

Si Léo-Paul Lauzon utilise souvent la voie de l’humour pour parler de problèmes graves, c’est sans doute pour mieux cacher ses émotions. Sensibilisé à la pauvreté dès sa plus tendre enfance, au cours de laquelle il lui est arrivé de passer plusieurs jours sans avoir rien à se mettre sous la dent, Léo-Paul Lauzon prête une oreille particulièrement attentive aux problèmes sociaux qui l’entourent. Il est même devenu un véritable défenseur de la veuve et de l’orphelin.

« Tout ce cheminement vient de ma jeunesse. J’ai vécu dans la pauvreté extrême. Dans les quartiers où j’ai été élevé, j’avais des amis bien plus brillants que moi qui ont viré dans la criminalité ou qui sont décédés jeunes. Quand l’État n’est pas présent, les pires victimes, ce sont les mères de famille monoparentale. Ma mère a souffert. J’ai eu un père qui battait ma mère et qui nous a abandonnés quand nous étions très jeunes. Les fins de mois, on ne mangeait pas. Jamais on n’a eu un cadeau à Noël. J’ai commencé à travailler tous les soirs, à l’âge de 12 ans, pour aider ma mère. Imaginez comment cette femme a pu souffrir de ne pas pouvoir nourrir ses enfants ! »

Sa mère et son psy, qu’il appelle Fred, reviennent souvent dans ses chroniques, comme s’il s’agissait de ses plus grands admirateurs, et l’ancien chef syndicaliste, Michel Chartrand, est souvent son bouc émissaire. « On est amis depuis douze ans. Avant de le connaître, je n’avais jamais prononcé un juron de ma vie, j’avais un caractère en or et je n’avais jamais raconté d’histoire cochonne. Tout ça vient de Michel Chartrand. Il a même contaminé ma famille. Au primaire, ma petite fille s’est mise à sacrer et a reçu plusieurs avertissements ! »

Indubitablement, Léo-Paul Lauzon a autant l’esprit missionnaire que Michel Chartand et autant de charisme, d’humour et de sensibilité. Ce don Quichotte de l’économie nous séduit par son franc-parler et son impertinence. Mais surtout, il nous livre un point de vue critique qui va à l’encontre du discours néo-libéral de la presse conventionnelle. Sa réflexion engendre des débats qui demeurent indispensables pour l’avancement de la démocratie.

Dans une société où la liberté d’opinion est souvent opprimée, voire contrôlée par les diktats des penseurs de la mondialisation, Léo-Paul Lauzon nous donne l’espoir, par ses interventions, que le système démocratique n’est pas un leurre.


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Léo-Paul Lauzon en 17 volumes :

Contes et comptes du Prof Lauzon - Le néo-libéralisme dénoncé net, fret, sec !, Léo-Paul Lauzon, Lanctôt, 2001, 246 pages.

Privatisations : l’autre point de vue, Léo-Paul Lauzon et autres, L’Aut’Journal et la Chaire d’études socio-économiques, 1998, 265 pages.

Finances publiques et profits privés, Michel Bernard et Léo-Paul Lauzon, L’Aut’Journal et Chaire d’études socio-économiques, 1996, 142 pages.

La comptabilité : un outil de gestion, Tome 2, 2e édition, Michel Bernard et Léo-Paul Lauzon, Gaëtan Morin Éditeur, 1996, 784 pages.

La comptabilité : un outil de gestion, Tome 1, 2e édition, Michel Bernard et Léo-Paul Lauzon, Gaëtan Morin Éditeur, 1994, 803 pages.

Fondements conceptuels de la comptabilité financière, Léo-Paul Lauzon, Gaëtan Morin Éditeur, 1990, 203 pages.

Cases in financial accounting: Intermediate & advanced, Léo-Paul Lauzon et autres, John Wiley & Sons, 1990, 233 pages.

L’information sociale au Canada, Léo-Paul Lauzon, Éditions Sciences et Culture Inc., 1989, 389 pages.

Théorie comptable : problèmes solutionnés, 3e édition, Léo-Paul Lauzon, Gaëtan Morin Éditeur, 1988, 246 pages.

Contrôle de gestion, 2e édition, Michel Bernard, F. Gélinas et Léo-Paul Lauzon, Gaëtan Morin Éditeur, 1985, 715 pages.

Information sur les effets de variations de prix, Léo-Paul Lauzon, Gaëtan Morin Éditeur, 1984, 625 pages.

La comptabilisation des impôts sur les bénéfices, Léo-Paul Lauzon, Gaëtan Morin Éditeur, 1984, 193 pages.

L’amélioration des conditions de travail, Michel Bernard et Léo-Paul Lauzon, Institut National de Productivité, 1984, 124 pages.

L’information sociale au Canada, Léo-Paul Lauzon, Éditions Sciences et Culture Inc., 1984, 247 pages.

L’Homme d’affaires québécois, G. Tarrab, MG Bédard et Léo-Paul Lauzon, Éditions Hurtubise HMH Ltée, 1983, 418 pages.

La comptabilité sociale, Léo-Paul Lauzon, Éditions Sciences et Culture Inc., 1981, 313 pages.

Sujets de théories et pratiques comptables, Michel Bernard et Léo-Paul Lauzon, Éditions Commerce, 1976, 110 pages.




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Harcèlement de la part de nos employeurs
par francine brunette le 22 mai 2008

je voudrais faire valoir les mesures de harcèlement de la part  de nos employeurs et si possible, de les publier dans les médias.

 

 

Merci,

bien à vous

 

 

Article satisfesant mais j'aimerais discuter avec léo-paul
par bruno-levesque le 15 mars 2008

ON a pas besoin dre vivre dans une dictature pour etre capable de se tenir debout. Comme disait chartrant, patient,tolérant et peureux. C'est une maudite belle descriscription  du peuple QUEBECOIS.

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La Chronique de Frédérique David
par Frédérique David

D’origine française, Frédérique David réside depuis plus de quinze ans au Québec et travaille comme journaliste indépendante pour plusieurs publications.

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