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Le dilemme du tramway de Philippa Foot – penser la morale et l’éthique

par
Professeur, Faculté de droit, Université Laval, Québec, membre de Tolerance.ca®

« Le dilemme du tramway » (« the trolley problem ») de Philippa Foot (1920-2010) se distingue philosophiquement. C’est une expérimentation en pensée, exemplaire, formatrice et instructive. En d’autres termes, une expérience révélatrice quant à notre façon d’agir et de justifier en morale et en éthique nos actes et nos omissions. Et avant tout, c’est un dilemme qui prouve qu’en éthique (comme en droit) « les mains propres » peut bien être le préférable et l’idéal, dans la réalité morale et éthique, il y a des choix à faire et surtout des choix douloureux, pénibles, avec des conséquences malheureuses, des choix qu’il faut assumer, vivre avec. Dans le présent article, nous visons à analyser ce dilemme dit « du tramway », d’expliquer la pertinence pour le débat moral et éthique contemporain. Nous le ferons en insistant, en arrière-fond, sur l’importance de la psychologie morale, souvent (même très fréquemment) l’angle mort dans tout débat moral et éthique.  

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L’instigatrice du dilemme, c’est la philosophe britannique Philippa (Ruth Bosanquet) Foot (1920-2010) (1). Le dilemme se trouve décrit dans l’article intitulé « The Problem of Abortion and the Doctrine of the Double Effet » (2) (Le problème de l'avortement et la doctrine du double effet, 1967). Philippa Foot est fréquemment présentée comme développant un aristotélisme éthique fondé sur la vertu (le tournant arétaïque) (3). L’éthique de la vertu s’oppose, principalement, à la déontologie (kantisme), à l'utilitarisme ou au conséquentialisme en éthique, en défendant qu’il faille prendre au sérieux la psychologie morale et l’individu appelé à agir, en pratique, de façon morale et éthique. L’éthique de la vertu s’oppose en pratique à toute tendance « législatrice » en éthique (sans le réussir) en appelant à un retour vers l’individu et sa psychologie morale. D’autres penseurs de l’éthique de la vertu sont Gertrude E. M. Anscombe (une amie de Philippa Foot), Alasdair MacIntyre, Martha Nussbaum, Amartya Sen. Et à propos de l’intitulé « l’éthique de la vertu », nous avons toujours considéré que celle-ci a dû être modifiée pour un intitulé différent et plus approprié.

Éclaircissement sur la doctrine du double effet.

Une incursion, nécessairement brève, concernant la doctrine du double effet s’impose avant d’analyser le dilemme du tramway. La pensée de Philippa Foot trouve sa source, à partir de cette doctrine, et il faut en conséquence l’expliquer, de façon succincte, au préalable.

La doctrine du double effet s’intitule ainsi parce qu’elle justifie d’agir dans des conflits moraux dans lesquels un acte aura deux effets, l'un mauvais et l'autre également mauvais, mais « moins ». La doctrine sert à expliquer qu'il est toujours mal d'accomplir intentionnellement un acte mauvais afin d'en tirer de bonnes conséquences, mais qu'il est parfois permis d'accomplir consciemment un acte mal face à un autre mal si cela résultera dans un moindre mal. Face aux deux maux inévitables et involontaires (non intentionnés), il faut choisir le résultat que peut se défendre comme ayant l’effet le moins mal.

Cette doctrine s’appuie sur quatre conditions qui doivent être remplies pour qu'un acte soit moralement permis :

1. La condition de la nature de l'acte. L'action doit être soit intentionnellement défendable comme soit « moins mal », soit indifférente. Tuer intentionnellement une personne innocente n'est donc jamais permis.

 2. La condition de la fin et des moyens. L'effet mauvais, le moindre mal, ne doit pas être le moyen par lequel on obtient l'effet choisi.

3. La condition de la bonne intention. L'intention doit seulement être l'effet intentionnellement défendable comme « moins mal », l'effet mauvais n'étant donc qu'un effet secondaire involontaire. Si l'effet mauvais, le moindre mal, est un moyen d'obtenir l'effet choisi, alors l'acte est immoral. L'effet néfaste peut être prévu, mais ne doit pas être intentionnel.

4. La condition de proportionnalité. L'effet défendable, le moindre mal, doit être au moins aussi important que l'effet néfaste. Si l’utérus de la femme est cancéreux, elle peut subir une hystérectomie, même si cela entraîne la mort du fœtus. Sauver la vie de la femme est un grand bien, au moins aussi bon que sauver le fœtus.

Tuer un innocent pour obtenir un effet « défendable » n'est donc jamais justifié, même pas pour sauver une ville entière, ni le monde. Le « Fiat justitia, ruat caelum », « Que justice soit faite, même si le ciel nous tombe dessus. », a de ce fait été confirmé.  

St Thomas d’Aquin et la doctrine du double effet

L’origine initiale de la doctrine du double effet, c’est St Thomas d’Aquin (1225/6-1274). Il la présente ainsi :      

« Est-il permis de tuer un homme pour se défendre? Réponse: Rien n'empêche qu'un même acte ait deux effets (duos effectus), dont l'un seulement est visé (in intentione), tandis que l'autre ne l'est pas (praeter intentionem). Or les actes moraux reçoivent leur spécification de l'objet que l'on a en vue, mais non de ce qui reste en dehors de l'intention (praeter intentionem), et demeure, comme nous l'avons dit, accidentel à l'acte. Ainsi l'action de se défendre peut entraîner un double effet (duplex effectus): l'un est la conservation de sa propre vie, l'autre la mort de l'agresseur. Une telle action sera donc licite si l'on ne vise qu'à protéger sa vie, puisqu'il est naturel à un être de se maintenir dans l'existence autant qu'il le peut. Cependant un acte accompli dans une bonne intention peut devenir mauvais quand il n'est pas proportionné à sa fin. Si donc, pour se défendre, on exerce une violence plus grande qu'il ne faut, ce sera illicite. Mais si l'on repousse la violence de façon mesurée, la défense sera licite. Les droits civil et canonique statuent, en effet: « Il est permis de repousser la violence par la violence, mais avec la mesure qui suffit pour une protection légitime (vim vi repellere licet cum moderamine inculpatae tutelae). » Et il n'est pas nécessaire au salut que l'on omette cet acte de protection mesurée pour éviter de tuer l'autre; car on est davantage tenu de veiller à sa propre vie qu'à celle d'autrui.

Mais parce qu'il n'est permis de tuer un homme qu'en vertu de l'autorité publique et pour le bien commun, nous l'avons montré, il est illicite de vouloir tuer un homme pour se défendre, à moins d'être investi soi-même de l'autorité publique. On pourra alors avoir l'intention de tuer directement pour assurer sa propre défense, mais en rapportant cette action au bien public; c'est évident pour le soldat qui combat contre les ennemis de la patrie et les agents de la justice qui luttent contre les bandits. Toutefois, ceux-là aussi pèchent s'ils sont mus par une passion personnelle. » (4)

De St Thomas d’Aquin, il en ressort qu’entre deux maux inévitables et dans une situation où prévaut « action », il faut choisir (et juger) soigneusement et opter en faveur du moindre mal. Surtout, il faut le faire avec la conscience, que le mal que tu accepteras, s’infligera, se réalisera, avec mesure, avec équilibre, avec prudence, de sorte qu’il ne doit jamais être infligé.  

La question de l’intentionnalité impliquée dans la doctrine du double effet est retravaillé par Gertrude Elizabeth M. Anscombe, dans son ouvrage L'Intention (5). Elle vise à expliquer dans quelles circonstances il est permis de parler d’une intention. Pour elle « l'intention d'un individu, c'est son action », ce qui est en ligne avec la doctrine du double effet.

Philippa Foot et la formulation du dilemme du tramway

Maintenant, quelques mots explicatifs s’imposent sur la vision morale et éthique dominant après 1945. Philippa Foot écrivait son article en 1967 et l’objectif, c’est de réfuter, contester, la vision alors dominante concernant les jugements moraux et éthiques. La vision alors dominante, c’était que les jugements moraux n'étaient pas de nature à être vrais ou faux (ce qu’ils devraient être), car ils ne décrivaient pas le monde. En ne décrivant pas le monde, les jugements moraux étaient donc supposés (faussement) de relever théoriquement aux conceptions non cognitivistes de la morale, notamment l'émotivité (A. J. Ayer) (6) et le prescriptivisme (R. M. Hare) (7). Deux théories dont Philippa Foot conteste le bien-fondé, car elles produisent l’idée que selon laquelle les jugements moraux seraient de simples expressions d'attitudes ou de commandements personnels. Elle contestait identiquement le scepticisme moral et l'égoïsme éthique que cela impliquait. Pour elle, les jugements moraux pouvaient être évalués pour leur vérité ou leur fausseté en fonction de leur relation avec l'épanouissement humain, avec des vertus comme la justice et la bienveillance, des vertus essentielles à cette plénitude, même si elles nécessitent parfois un sacrifice de soi.

Subséquemment, pour Philippa Foot, le dilemme du tramway montre que les individus agissent dans des situations morales de manière pratique, que, dans ses situations morales, il y a de choses à faire, qu’il y a des choix à effectuer. En pratique, les gens ordinaires tendent, ambitionnent, aspirent et d’agir de façon juste et bonne, de faire le moindre mal possible, d’assurer que se réalise dans le monde autant de bien que possible (i.e. l’épanouissement humain) et le moindre mal qu’également possible. Ce qu’est une position de philosophie pratique prenant au sérieux la psychologie morale des personnes existant en temps et en espace. C’est dans ce sens qu’elle écrit :

« Supposons qu'un juge ou un magistrat soit confronté à des émeutiers exigeant la recherche d'un coupable pour un crime donné et menaçant de se venger de façon sanglante sur une partie de la communauté. Le véritable coupable étant inconnu, le juge estime pouvoir empêcher le carnage uniquement en faisant accuser un innocent et en le faisant exécuter.

À côté de cet exemple, un autre illustre le pilote d'un avion sur le point de s'écraser, qui doit décider s'il doit passer d'une zone plus ou moins habitée à une zone moins habitée.

Pour rapprocher le parallèle, on peut supposer qu'il est le conducteur d'un tramway fou, qu'il ne peut diriger que d'une voie étroite à une autre ; cinq hommes travaillent sur une voie et un homme sur l'autre ; quiconque s'y engage est condamné à mort. Dans le cas des émeutes, la foule a cinq otages, de sorte que, dans les deux exemples, l'échange est censé être la vie d'un homme contre celle de cinq.» (8).

Il convient d’observer en premier lieu que Philippa Foot introduit deux situations : d’abord l’exécution d’un bouc émissaire, et, ensuite, le dilemme du tramway. Pour les deux situations, Philippa Foot se réfère directement à la doctrine du double effet : (1) le juge, le magistrat, s’engage intentionnellement à sacrifier un individu irréprochable, innocent, pour déjouer la vengeance sanglante infligée sur cinq otages; (2) le conducteur d'un tramway fou, pour sa part, s’efforce consciencieusement de faire le moindre mal possible dans une situation particulière où n’existent pas d’autres résultats prévisibles qu’un mort comparé à cinq morts. Dans les deux situations, les acteurs, le juge ou le conducteur (et le pilote) engagent leurs « consciences », ils ont le choix et ils doivent, dans l’exemple, agir. Examinons les deux exemples selon la doctrine du double effet.

Le malheur qui arrive et le cadre d’un plan

Pour Philippa Foot, il existe une différence pertinente et pratique entre les deux exemples. La différence, pour elle, c’est que :

  1. Le conducteur du tramway n’a pas vraiment l’intention de tuer qui que ce soit, il se trouve dans une situation qui le force à choisir entre tuer une personne ou en tuer cinq. Son « faire » est simplement « capté » (emprisonné) par le choix de choisir entre tuer un ou tuer cinq! Autrement dit, sa conscience n’est pas guidée par une quelconque intention de tuer une personne ou en tuer cinq, la situation l’incite toutefois à agir de manière à ce que son acte ait pour résultat le moindre mal possible. Et ici, le moindre mal consiste à sauver cinq personnes vivantes au prix d’une seule mort.
  2. Le juge, le magistrat, pourtant, a l’intention de faire tuer le bouc émissaire, de le faire tuer pour le bien commun (le bien général). Il fait un calcul : une personne morte contre cinq otages. Il s’agit d’un calcul qu’il effectuera lui-même, qu’il officialisera en public (pour dissuader les actes de vengeance qu’il craint). Bref, le juge, le magistrat, doit se présenter face au bouc émissaire et annoncer que celui-ci sera sacrifié pour sauver cinq otages. C’est donc un plan (une stratégie) dans le sens précis où ’il doit orchestrer tout cela pour avoir l’effet escompté. Sans réalisation du plan (la stratégie) faisant quelqu’un de bouc émissaire, sans l’exposition publique de ce bouc émissaire, sans ordonner et programmer, il n’aura aucun effet (sauvetage) prévisible.

Les deux situations expriment l’un des paradigmes fondamentaux, non franchissables, pour Philippa Foot (et pour l’éthique de la vertu contemporaine) : la différence entre ce que :

  1. Ce que tu ne feras jamais, ou autrement dit : il y a de choses que tu ne feras jamais : tuer, torturer, "esclavager », battre, agresser, etc.
  2. Ce que tu es forcé, par les circonstances particulières, à faire (et non voulu intentionnellement), et où il convient d’agir ainsi que le moindre mal prévoit.

La différence en effet entre les deux, en droite ligne avec la doctrine du double effet, c’est que no 1 est prioritaire (et même absolu per se – (avec le problème relatif au statut du fœtus en tant que vie; que nous n’abordons pas), et le no 2 est secondaire et soumis à l’obligation (volontaire) de mener une vie défendable devant la morale communément acceptée (et bien sûr devant Dieu).

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Le calcul utilitariste contre la vertu

L’utilitarisme se conçoit comme une éthique législative. Par une éthique législative, nous comprendrons une conception éthique qui introduit une loi suprahumaine qui dicte ce qu’un individu (ou une collectivité) doit faire. Une éthique législative refuse (ou simplement saut au-dessus) la psychologie de l’individu (et de la psychologie morale) pour imposer un devoir, un devoir-être, une obligation, une norme, une normativité, servant comme instance législative à laquelle tout individu (et collectivité) doit être soumis.

En ce qui concerne « le juge, le magistrat » dans l’exemple de Philippa Foot, il nous semble que c‘est une critique dirigée à l’encontre de l’utilitarisme, l’utilitarisme autant classique que néo-utilitariste. Car l’utilitarisme, notamment dans sa monture benthamienne, est entièrement construit sur le paradigme législatif d’un calcul, d’un calcul de bien-être pour le plus grand nombre.

Rappelant que, pour Jeremy Bentham (1748-1839), la morale, l’éthique, c’est une question de calcul de l’utilité, autant pour l’individu que pour un gouvernement (y compris le système militaire). Comme il le professait :

« La nature a placé l’humanité sous le gouvernement de deux maîtres souverains, la douleur et le plaisir. (…)

Par principe d’utilité, on entend le principe qui approuve ou désapprouve toute action, quelle qu’elle soit, selon la tendance qu’elle semble avoir à augmenter ou à diminuer le bonheur de la partie dont l’intérêt est en jeu ou, en d’autres termes, à promouvoir ce bonheur ou à s’y opposer. Je parle de toute action, quelle qu’elle soit, et par conséquent, non seulement de toute action d’un individu privé, mais aussi de toute mesure gouvernementale. (…)

On entend par utilité la propriété par laquelle un objet tend à produire du bénéfice, des avantages, du plaisir, du bien ou du bonheur (tout cela, en l’occurrence, revient au même), ou (ce qui revient encore au même) à empêcher que du dommage, de la douleur, du mal ou du malheur n’advienne à la personne dont on considère l’intérêt. S’il s’agit de la communauté en général, l’utilité sera alors le bonheur de la communauté ; s’il s’agit d’un individu particulier, l’utilité sera alors le bonheur de cet individu.» (9)  

Ce qu’est, hélas, une position théorique (et morale), une position législative, qui prescrit un mode de calcul anonyme, indifférencié, ayant comme conséquence l’absence pratique et réelle de l’individu, de l’intention, de volonté, et de tous les aspects qui rattachent l’individu à sa moralité, à la moralité comme rattachée à la psychologie pratique d’un individu concret. L’utilitarisme benthamien véhicule une abstraction intellectuelle (et législative) introduisant un élément particulier, le quantifiable (i.e. ce qui peut être mesuré, quantifié), pour à partir de cet élément, trouver la douleur ou le plaisir.

Un partisan de l’utilitarisme ne manifesterait aucune hésitation dans les deux situations évoquées par Philippa Foot, il sait, par a priori législatif, quoi faire et tout se réduit pour lui à une question de calcul. Dans le premier exemple, mieux sacrifier un bouc émissaire (ou un souffre-douleur) que de sacrifier la vie de cinq otages, pour ne rien ajouter, si cela s’empire, quant à un bain de sang d’innombrables citoyens tous innocents. Pour un utilitariste, c’est toujours le bonheur de la communauté en général qui pèse la plus lourde, ce qui justifie à sacrifier l’un pour le plus grand nombre. Et le deuxième exemple (le conducteur du tramway), ne se distinguera en rien, c’est toujours le calcul utilitaire qui doit effectuer, valider, justifier, le choix.

Vu que l’article de Philippa Foot fut écrit en 1967, qu’elle était alors professeure à Oxford, qu’elle était amie avec Gertrude E. M. Anscombe, cet article fait penser à un évènement survenu en 1956. En 1956, G. E. M. Anscombe s’opposait publiquement (et moralement) contre la remise d’un doctorat honoris causa à l’ex-président Harry Truman, l’instigateur (et commandant en chef de l’armée américaine) pour le bombardement de Hiroshima et Nagasaki en 1945. Gertrude E. M. Anscombe tenait l’ex-président Truman pour moralement responsable d’avoir ordonné intentionnellement le meurtre des civils à Hiroshima et Nagasaki, au Japon, en 1945 (10). Si la bombe atomique a permis la capitulation du Japon et la fin de la Deuxième Guerre mondiale, il exister, selon Anscombe, de choses que tu ne feras jamais, selon l’éthique de la vertu, à savoir tuer, tuer des civils, tuer sans discernement (11).

Pour un utilitariste pur et dur, une telle position relève de l’hypocrisie. Et une question de calcul, si Hiroshima et Nagasaki étaient 120.000 morts directes (d’où s’ajouter des morts indirects), la continuation de la guerre aurait dû coûter plus, peut-être un demi-million de morts, peut-être un million, peut-être deux millions, peut-être trois millions. Comment le savoir ? Et comment, dans ce cas, distinguer entre innocent et non-innocent? Dans une guerre, tout le monde n’est-il pas innocent, inclus les soldats?

Aux États-Unis, « l’utilitarisme de la règle » (rule-utilitarism) a aujourd’hui, amplement, remplacé l’utilitarisme pur et dur et prône un résultat plus en ligne avec l’éthique de la vertu. (12)

Contre toute éthique législative

Si l’utilitarisme est une doctrine éthique législative puissante, le déontologisme kantien (et non kantien) l’est encore plus. Philippa Foot critique le déontologisme kantien comme trop dogmatique, trop éloigné de la psychologie morale.

Le côté législatif de déontologisme kantien trouve son origine dans l’incapacité d’ Emmanuel Kant (1724-1804), à résoudre « la loi » de David Hume (13), de surmonter le faux-pas-naturaliste interdisant le saut de l’être vers le devoir-être. Kant saute simplement au-dessus du problème pour s’investir dans un devoir-être pur, pour s’investir au profit d’un devoir-être législatif, s’investir en faveur d’une loi morale flottant (supposément) au-dessus de tous et pareil a un a priori théorique (impossible de se faire pratique, car il n’a aucun « ancrage » dans l’expérience) (14). L’éthique de Kant, c’est une morale d’un devoir-être déontologique, c’est-à-dire qui opérationnalise avec un devoir-être a priori et fondationnaliste, un devoir-être préétabli ayant la vocation de soumettre, librement, les individus à une loi morale qui doivent les gouverner.  Avec d’autres mots, là où l’utilitarisme est une législation par le quantifiable, le kantisme se révèle être une autolégislation qui s’impose par une éthique pure et hypothétique.

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De la sorte, l’idéologie déontologique, la loi morale de Kant, s’impose sous forme d’un impératif catégorique qui est imposé aux individus en vertu de leurs qualités d’être des humains rationnels.

« Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu puisses vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle ». (15)

Pour respecter une telle injonction, l’individu doit la faire sienne sous le mode d’une loi morale, pour mieux l’actualiser, à tout moment, en autolégislation. Toutes les inclinations humaines, qu’elles soient bonnes ou mauvaises, sont donc effacées par cette autolégislation et nulle exception ne doit être tolérée ou accordée. Le devoir doit gouverner autant l’individu que les relations que l’individu peut entreprendre avec d’autres individus. Kant réactive le rôle du « devoir » présent dans le protestantisme piétiste, sous le mode d’une autolégislation détachée de la religion chrétienne, de la Loi entendue comme norme divine, il fait apparaître la Loi comme norme rationnelle.

Dans l’approche de Kant, les actions sont considérées comme bonnes ou mauvaises à priori. Kant considère comme donné (par la loi morale) qu’il y ait un « tu dois » et un « tu ne dois pas » qui discernent entre les actes moraux humains. Le « tu dois », le devoir-être, pour lui, introduit une obligation absolue, un devoir-être inconditionnel. De ce fait, tuer est toujours, inconditionnellement, une action condamnable. Mentir l’est également, même si ce mensonge ne lèse apparemment personne en particulier. Le dernier a d’ailleurs donné lieu au débat fameux entre lui et Benjamin Constant (1767-1830) concernant « le droit » (i.e. la moralité) de mentir (16). De façon pragmatique, Constant considère qu'il existait un « droit de mentir par humanité », là où Kant défendait de façon absolue que le mensonge (même le « mensonge blanc», le petit mensonge) soit toujours immoral (nonobstant les conséquences néfastes pour de tierces personnes).

Tout ceci nous amène à la confirmation que, pour un kantien, un déontologue, le dilemme du tramway, est facile : il faut simplement faire son « devoir » et son devoir est de ne tuer personne, ni l’un ni les cinq. Si possible, il faut sauter hors du tramway fou (ou se réfugier à l’arrière)! Un kantien, un déontologue, doit sauver sa conscience, son âme, et sa possibilité de rédemption, il ne doit pas être impliqué dans le meurtre ni de l’un ni des cinq. Pour un kantien, un déontologue, le nombre de morts est l’extérieur (hors devoir) d’un devoir « intérieur » (autolégislation).

Le dilemme du tramway et la suite

À partir du texte de Philippa Foot, le dilemme du tramway commence, philosophiquement, de vivre sa propre vie. Le dilemme n’avait simplement plus besoin de Philippa Foot, rapidement il est devenu un intrique (i.e. une expérience de pensée)  philosophique pour tout le monde et pour toutes les causes (17). Fait significatif, l’enracinement du dilemme dans la doctrine du double effet a disparu comme si elle n’avait jamais existé. Le principal responsable de la disparition de la doctrine du double est l’introduction d’une modification substantielle et rusée, qui incombe à l’étasunienne Judith Jarvis Thomson (1929 –2020) (18). Judith Jarvis Thomson change en effet tout! Elle effectue un changement radical, une modification de sens, une substitution sur le niveau des acteurs.

Les modifications qu’effectue Judith Jarvis Thomson auront comme effet que le dilemme du tramway devient un choix de sacrifice. Elle introduit deux scénarios.

Dans l’un, il s’agit de sacrifier un homme corpulent (communément appelé fat man) pour sauver cinq personnes attachées aux rails. Un choix qui s’effectue par un bystander, un témoin, un spectateur, qui est là, qui voit la situation, qui, de façon délibérée, intentionnelle, fait le choix entre qui doit vivre et qui doit mourir. Il le fait par le maniement d’une manette envoyant le tramway dans une direction, vers le mort d’un, ou dans une autre (vers le mort de cinq. Et bien sûr, il devient par son choix pour l’un mort et cinq sauvés, c’est prévisible, le héros du jour, dans les journaux.

Dans une autre version de ce scénario, le témoin, l’observateur, est encore plus entreprenant, actif, car, pour sauver les cinq, il doit pousser l’homme corpulent en bas d’un pont/passerelle pour qu’il tombe sur les rails et pour que son corps corpulent arrête le tramway avant qu’il ne heurte les cinq personnes attachées aux rails.

Les deux scénarios inventés par Judith Jarvis Thomson servent philosophiquement à soutenir la thèse d’équivalence, à savoir que si le résultat est pareil dans les deux cas (i.e. mort d’homme, un ou cinq), l’intention est (supposément) libre de se justifier par le résultat obtenu (i.e. l’un mort contre cinq morts, c’est quatre vies épargnées; comme chez Bentham). Dans les deux scénarios introduits par Jarvis Thomson, vous réaliserez donc quelque chose de positif (à comparer avec « le moindre mal » chez Philippa Foot) vous sauvera cinq vies humaines en sacrifiant, dans le premier scénario, un individu, dans le deuxième scénario, un homme corpulent. En acceptant de sacrifier des êtres humains, un sacrifié contre cinq en vie, vous obtiens à justifier votre action par le gain obtenu sur la balance de morts.

Critique de Judith Jarvis Thomson

La doctrine d’équivalence (19) (i.e. équivalence entre moyen et résultat, défendant que le résultat justifie, légitime, « équilibre », le moyen) de Judith Jarvis Thomson, expulse, remplace, se substitue à, la doctrine du double effet de Philippa Foot (et de St Thomas d’Aquin). Pourtant, drôle de morale, drôle d’éthique! Judith Jarvis Thomson, se distancie de façon abstraite de la réalité, s’éloigne de toute psychologie morale pour être convaincante. Aux grandes horreurs, Philippa Foot n’aurait jamais adossé une telle construction, réécriture, du dilemme du tramway dans une direction ouvertement sacrificielle!

Une des raisons de la modification du dilemme du tramway de Judith Jarvis Thomson c’est qu’une fois le raisonnement sacrificiel accepté et endossé comme moralement, éthiquement, corrects, l’exemple peut être transposé pour servir comme justification dans le cas d’avortement (20). Judith Jarvis Thomson reconnaissait (ce que beaucoup de féministes nient farouchement) que le fœtus (similaire à l’homme corpulent) est une vie, et elle construit, en faveur de l’avortement à volonté, la thèse que la mort du fœtus ne résulte que d’une « interruption de service » (i.e. le service de la manette de rails). La mort du fœtus, lors de l’avortement, ne résultera donc pas d’un acte direct de la mère, mais de la fin de l’acte d’incuber le fœtus opérationnalisé par une tierce personne. Autrement dit, tout se résume de manipuler une manette pour rediriger « la vie », en faveur de la femme ou en faveur du fœtus. Un argument qu’a eu (et aura également aujourd’hui) un succès énorme, stupéfiant, auprès des partisans pour l’avortement, car il ne s’agit que de « la fin de service » selon la volonté de la femme. Toutefois, il y a des raisons pour croire qu’elles, ils, n’ont pas compris le piège éthique (sacrificielle!) que représente la construction de Judith Jarvis Thomson.

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Or, la construction philosophique de Judith Jarvis Thomson singulière l’homme corpulent (et le fœtus), avec le résultat que l’homme corpulent peut à volonté être remplacé par d’autres catégories d’hommes et femmes (même remplacés avec des animaux intelligents, animaux porteurs d’antivirus, etc.). Comme il ne s’agit que d’une question « qui voulait vous sacrifier et qui voulait vous sauver », l’imaginaire ouvre les vannes. L’individu corpulent a été remplacé par une personne de déficience mentale, un handicapé physique, une clocharde, un bon à rien, etc., à évaluer contre la mort de cinq personnes ordinaires. Et dans la même veine, pourquoi ne pas sacrifier cinq individus ordinaires pour sauver une personne super intelligente, un génie, un médecin chercheur nobélisé, une ingénieure en construction spatiale? Avec le résultat que ce sont plutôt nos préjugés, nos familiarités, nos préférences, qu’entrent en ligne, et qui, supposément, doivent révéler nos préjugés, nos sympathies, nos identités.

Se révèle toutefois la limite de toute singularisation, car, si le choix était le sacrifice d’un fils, d’une fille, d’un époux, d’une épouse, d’un père, d’une mère, comparé avec le sacrifice de quelques inconnus, il se découvrait rapidement qu’un amour filial, familial, affectif, fausserait tout modèle théorique construit en l’absence de l’humain, de l’individu concret. La psychologie morale nous renseigne en fait mieux, nous renseigne au contraire à toute abstraction théorique, que notre choix serait d’abord de sauver nos enfants, nos chères, nos amies. 

Coda

Toutefois, ne nous comptons pas parmi les partisans de l’éthique de la vertu. Plaidons plutôt qu’il faut avoir l’esprit ouvert pour apprécier, pour apprendre et pour réfléchir sur ce que nous enseignent les théories d’éthique. Se découvre vite, en morale, en éthique, qu’il ne s’agit pas d’avoir raison, d’imposer la meilleure (soi-disant) théorie, mais de comprendre, de façon critique, les modes de raisonnement, de justifications, de démonstrations, en jeu.

Notre position dans le terrain moral, éthique, c’est qu’il vaut mieux apprendre à nous comprendre les uns des autres que de s’aveugler obstinément comme partisan d’une théorie unique. Si quelqu’un ne partage pas les mêmes convictions morales ou éthiques de nous, il ne doit pas être rejeté comme égaré, mais écouter, dans la limite du raisonnable (et de la tolérance), avec respect et attention. Nous n’avons pas besoin d’être d’accord, mais c’est profondément inutile, contre-productif, de croire posséder une quelconque suprématie morale et éthique.

Nous n’estimons également que toute théorie morale et éthique profiterait profondément par un ancrage dans la réalité, dans la psychologie morale de gens ordinaires, un ancrage dans le concret moral tel qu’il se révélerait dans la psychologie morale. Cartographier la psychologie morale, envisager comment nous prenons réellement des décisions morales en utilisant, prenons par exemple le dilemme du tramway comme expérience en pensée, ne peut dans ce sens que servir à nous éclairer.

NOTES

1. Cf. Clare Mac Cumhaill et Rachael Wiseman, Le quartet d'Oxford (Quand Elizabeth Anscombe, Philippa Foot, Mary Midgley, et Iris Murdoch réinventaient la philosophie, Paris, Flammarion, 2022. Benjamin J. B. Lipscomb, The Women Are Up to Something: How Elizabeth Anscombe, Philippa Foot, Mary Midgley, and Iris Murdoch Revolutionized Ethics, Oxford, Oxford University Press, 2021. 

2. Foot, Philippa, « The Problem of Abortion and the Doctrine of the Double Effect », Oxford Review, 1967, 5: 5–15; in, idem, Virtues and Vices (Oxford: Basil Blackwell, 1978). Article republié dans Bonnie Steinbock et Alastair Norcross (dir.), Killing and Letting Die, 2d ed. New York: Fordham University Press, 1994, p 266–279; également dans P. A. Woodward (dir.), The Doctrine of Double Effect: Philosophers Debate a Controversial Moral Principle, Notre Dame, IN: University of Notre Dame Press, 2002, p 143–155.

3. Foot, Philippa, 1978, Virtues and Vices, Oxford, Blackwell; idem, « Rationality and Virtue, » in H. Pauer-Studer (dir.), Norms, Values and Society, Amsterdam, Kluwer, 1994, p 205–16; idem, 1995, « Does Moral Subjectivism Rest on a Mistake? », Oxford Journal of Legal Studies, 1995, 15, p 1–14; idem, Natural Goodness, Oxford, Clarendon Press, 2001 (traduit en français: idem, Le Bien naturel, Genève, Labor et Fides, 2014.)

4. St Thomas d’Aquin, Somme de théologie II-II, q. 64, a. 7. La Somme de théologie fut rédigée entre 1266 et 1273 (et il demeure inachevé).

5. Gertrude Elizabeth Margaret Anscombe, L'Intention (1957), Paris, Gallimard, 2002.

6. Alfred Jules Ayer, Langage, vérité et logique (1936), Paris, Flammarion, 1956.

7. Richard Mervyn Hare, The Language of Morals, Oxford, Oxford University Press, 1952.

8. Philippa Foot, "The Problem of Abortion and the Doctrine of the Double Effect", in, idem, Virtues and Vices (Oxford: Basil Blackwell, 1978) (originally appeared in the Oxford Review, Number 5, 1967).

9. Jeremy Bentham, Introduction aux principes de morale et de législation (1789), traduction du Centre Bentham, Paris, Vrin, coll. Analyse et philosophie, 2011, p 25, 26.

10. Gertrude E. M. Anscombe, « Mr. Truman’s Degree » (1956), (Pamphlet distribué en privé); repris dans, idem, Metaphysics and the Philosophy of Mind (The Collected Philosophical Papers of G. E. M. Anscombe, Volume 2), Minneapolis, MN: University of Minnesota Press, 1981, p 62–71. C.f. G. E. M. Anscombe, « War and Murder », dans Walter Stein (dir,), Nuclear Weapons: a Catholic Response, London: Merlin, 1961, 43–62; repris, idem, Ethics, Religion and Politics (The Collected Philosophical Papers of G. E. M. Anscombe, Volume 3), Minneapolis, MN: University of Minnesota Press, 1981, 51–61.

11. Gertrude E. M. Anscombe, « La philosophie morale moderne » (1958),  Klēsis. Revue philosophique, 2008, no 9, p 12–31.

12. Cf. John (Bordley) Rawls, «Two Concepts of Rules », Philosophical Review, vol. 64, 1955, p 3-32. Reprise dans J. Rawls, Collected Papers, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1999, p 20-46. Notons que la reprise en 1999 a donné lieu à une rédaction très particulière : la note 23 dans l’original a été ressortie du texte et reprise comme « Appendix » (p. 43-46), avec effet que l’appendice se présente faussement comme se rapportant à tout l’article, tandis que la note 23 (en 1955) se rapporter à une argumentation spécifique. John Rawls, a également pris position contre le bombardement de Hiroshima et Nagasaki, voir, idem, « Peut-on justifier Hiroshima? » (1995), L’Esprit (Paris), No. 229 (2) (février 1997), p 119-128 ; idem, « Hiroshima, pourquoi nous n’aurions pas dû » (1995), Po&sie (Paris), 2005/2 N° 112-113, p 199-207. L’utilitarisme de la règle de John Rawls est critiqué par Bjarne Melkevik, « Rawls, l’utilitarisme et « Deux concepts de règles », dans, idem, Rawls ou Habermas. Une question de philosophie du droit, Québec, Presses de l’Université Laval, 2002, p 153-175.

13. David Hume, Traité de la Nature Humaine (1738–40), III, I, I, § 28. Traduction par Philippe Folliot (disponible sur le site électronique Les Classiques des sciences sociales UQAM.ca).

14. Jean-Louis Gardies, L'Erreur de Hume, Paris, Presses universitaires de France, 1987. 

15. Emmanuel Kant, Fondements de la métaphysique des mœurs (1785), Deuxième section, IV, 421, tr. Victor Delbos. 

16. Emmanuel Kant et Benjamin Constant, Sur le droit de mentir, Paris, Flammarion, coll. GF philo, 2022. cf., idem, Théorie et pratique ; D'un prétendu droit de mentir par humanité ; La fin de toutes choses : et autres textes, Paris, Flammarion, coll. GF, 1993.

17. Thomas Cathcart, The Trolley Problem, or Would You Throw the Fat Guy Off the Bridge?: A Philosophical Conundrum, New York, Workman Publishing Company, 2013. David Edmonds, Would You Kill the Fat Man?: The Trolley Problem and What Your Answer Tells Us About Right and Wrong, Princeton (N-J), Princeton University Press, 2015.

18. Thomson, Judith Jarvis, « Killing, Letting Die, and the Trolley Problem », The Monist, 1976, 59 (2): 204–217. Thomson, Judith Jarvis, « The Trolley Problem ». Yale Law Journal, 1985, 94 (6): 1395–1415.

19. James Rachels, The End of Life: Euthanasia and Morality, Oxford, Oxford University Press, 1986.

20. Judith Jarvis Thomson, Une défense de l'avortement (1971), Paris, Payot, coll. Petite Bibliothèque Payot, 2023.

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26 novembre 2025

 

 

 

 

 



* Image Archive.org. http://www.britac.ac.uk/sites/default/files/11_07-Philippa_Foot.pdf


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La Chronique de Bjarne Melkevik
par Bjarne Melkevik

Bjarne Melkevik, docteur ès droit de Paris II, professeur à la Faculté de droit de l’Université Laval (Québec), est un auteur prolifique dans le domaine de la philosophie du droit, de l’épistémologie et de méthodologie juridique. Ses plus récentes publications incluent... (Lire la suite)

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