L'exposition « En couleurs » au collège de Saint-Laurent : un franc succès
par
Véronick Talbot, collaboratrice, engagée dans le cadre de nombreux projets d'étudiants de Tolerance.ca

Dans le cadre de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale (21 mars), les étudiants en arts du cégep de Saint-Laurent ont été invités à réaliser des œuvres artistiques sur le thème de la diversité culturelle et de l’identité. Organisée en collaboration avec Tolerance.ca® dans le cadre de la série publiée sur son site et portant sur la diversité des valeurs et des croyances religieuses, l’exposition a duré une semaine et a attiré des centaines de visiteurs. Près de 40 étudiants étaient présents lors du vernissage. M. Victor Teboul, directeur de Tolerance.ca®, a pris la parole pour féliciter les participants. M. François La Bissonnière, membre de Tolerance.ca® et professeur au département de français au collège de Saint-Laurent, était également présent, de même que Mme Ariane Bureau, responsable du projet. Véronick Talbot, de Tolerance.ca®, a rencontré les participants.
La démocratie, garante de nos valeurs d’égalité
L’exposition « En couleurs » en a fait réfléchir plus d’un, confrontant les jeunes à la diversité et à des questions qui les touchent de près.
En prenant la parole pour féliciter les participants et les organisateurs, Victor Teboul, directeur de Tolerance.ca®, a tenu à rappeler que si la Journée du 21 mars doit nous sensibiliser à la lutte contre le racisme, elle doit aussi nous rappeler que notre société n’est pas raciste et, qu’au contraire, nous vivons dans un milieu inclusif fondé sur des valeurs démocratiques qui nous garantissent l’égalité et la liberté d’expression dans un esprit de respect mutuel. M. Teboul a souligné le fait que plus de la moitié de l’humanité ne connaît pas ces valeurs fondamentales qui font partie de notre vie quotidienne et qu’il faut lutter afin que la démocratie devienne aussi une réalité pour les autres peuples de la planète.
Ariane Bureau, responsable du projet et animatrice à la vie étudiante, saisit toutes les occasions possibles pour sensibiliser ses élèves à la diversité et pour leur permettre de s’exprimer sur celle-ci : « Je veux laisser la place aux élèves, savoir ce que signifie pour eux la Journée du 21 mars et connaître leur opinion sur la diversité et sur la notion de leur identité. » Cette initiative est d’autant plus pertinente que le collège compte parmi sa population étudiante 15% de jeunes issus de l’immigration. « Nos jeunes sont donc confrontés à la connaissance des autres cultures de façon quotidienne », commente Mme Bureau.
La peur de perdre son identité
Il ne faut pas faire l’erreur de croire que seuls les élèves originaires de l’extérieur du Québec se soient sentis interpellés par le projet de Mme Bureau. À l’heure actuelle, alors que l’on assiste à un phénomène de mondialisation et d’assimilation des cultures à celle des États-Unis, tous et chacun partagent une crainte semblable. Cette inquiétude se dégage des œuvres des étudiants : la peur de perdre ses origines culturelles et son identité. Trois étudiants en cinéma, Marie-Claude Lacerte, Isabelle Leduc et Simon Lesage, ont d’ailleurs utilisé le film comme médium pour illustrer ce phénomène et sensibiliser les jeunes Québécois qui ont tendance à trop souvent oublier leurs origines. « On voulait donner à notre film une vision de la situation qui nous est propre. On a donc inversé la réalité et on a présenté les gens d’ici comme étant une minorité visible afin qu’ils comprennent les immigrants, mais aussi pour montrer l’importance de conserver notre culture et les valeurs qui ont forgé notre peuple, car elles font partie de notre identité collective », souligne Isabelle en entrevue. Leur projet, « The Assimilation », illustre l’histoire d’une jeune étudiante qui vient d’emménager à Montréal et qui constate dès son arrivée que tout son entourage parle anglais. Lorsqu’elle rencontre enfin un étudiant qui parle sa langue, elle projette avec lui d’assimiler les autres à sa propre culture. « Le problème, c’est qu’on ne vit pas notre culture tous les jours. Par exemple, nous ne sommes plus attachés à la religion catholique, sauf lorsque vient le temps de nous affirmer devant les minorités visibles en tant que Québécois. Nous ne nous rendons compte de l’importance de notre culture que lorsque nous sommes confrontés à une autre culture, et c’est ce qui arrive au personnage principal de notre film », ajoute Isabelle.
Pour sa part, Ravy Puth, étudiante en arts plastiques, a adopté un autre point de vue sur le sujet. Native du Québec, de parents originaires du Cambodge, elle a pris conscience de ses origines, se rappelle-t-elle, lors d’un atelier animé par Ariane Bureau. À partir de ce moment-là, elle s’est rendu compte de l’importance qu’elle devait accorder à son origine cambodgienne parce que cela faisait aussi partie de son identité. « Auparavant j’étais intolérante envers ma famille parce qu’elle était trop conservatrice, ce qui est typique des Cambodgiens. J’étais fâchée parce que c’était comme si mon origine me privait de vivre des expériences. J’en voulais à ma propre identité. Puis, lorsque je me suis informée sur mes origines et sur ce pays, j’ai appris à l’apprécier. La compréhension m’a aidée à accepter ma situation et à la reconnaître comme étant partie intégrante de la personne que je suis aujourd’hui ». Ravy a composé trois tableaux en plâtre de 15 cm x 22 cm sur lesquels on peut voir des fragments de photographies de sa famille. « En fin de compte, c’est un travail sur moi que j’ai fait », reconnaît-elle.
Ouverture sur le monde et lucidité
Plusieurs autres œuvres illustraient l’ouverture d’esprit des artistes qui les ont créées. Catherine White, une étudiante en cinéma, a réalisé une série de neuf photographies en s’inspirant directement du titre de l’exposition, « En couleurs ». Affichant une jeune fille qui porte des vêtements colorés, qu’elle compare aux drapeaux de différents pays dans un texte qui accompagne les images, elle cherche à illustrer qu’au fil de nos expériences et de notre vécu, on acquiert des connaissances sur d’autres cultures, on apprend à les apprécier, voire à adopter certaines de leurs valeurs. Elle reste toutefois lucide quant à cette facilité d’accepter les autres en présentant un documentaire intitulé « Identités déracinées », dans lequel on apprend l’existence passée de pensionnats destinés aux Amérindiens. Ces institutions, établies par le gouvernement canadien et dirigées par l’Église catholique, avaient le mandat, selon Catherine, de détruire la culture autochtone par la méthode de la dépersonnalisation. « On a réalisé ce documentaire parce que c’était un sujet méconnu, et parce que les gens doivent savoir que ce genre de projets a déjà existé. Il est très réconfortant de voir à quel point nous avons évolué. Sensibiliser les gens ne peut que nous aider davantage dans le futur », rappelle Catherine. Cette dernière a d’ailleurs présenté le film dans une école secondaire, où les réactions des élèves ont été tout aussi surprenantes que celles des étudiants du cégep. « Il est difficile de s’identifier à un peuple de bourreaux et de retourner ainsi dans ce passé relativement récent où la population se refermait sur elle-même et sur sa culture, sans s’ouvrir à celle des autres. L’isolement empêche les échanges entre les différentes populations, et elle n’ouvre donc pas la porte à la compréhension de l’autre et à son acceptation », commente Marie-Claude à la suite du visionnement du film.
Pour sa part, Mylène Lavoie a rédigé trois poèmes intitulés « La richesse des autres cultures », « Mon pays, ma richesse » ainsi que « Le cégep, c’est… » dans le but de faire valoir son point de vue sur le sujet. « Je crois fortement en l’importance des autres cultures qui ont apporté beaucoup, par exemple, à la ville de Montréal qui n’aurait pas ce même visage sans eux. La vie au cégep ne serait pas non plus la même sans la présence de toutes ces cultures, desquelles on apprend un peu plus chaque jour. »
D’ailleurs, sur ce point, Mme Bureau, responsable du projet, est fière de ce que les élèves ont appris lors de cet événement. « Ils ont tous le même regard. Ils ont retenu ce message et ils veulent le transmettre aux autres, surtout que c’est à l’école secondaire et au cégep qu’on apprend à forger son identité. Si on est déjà sensibilisé à ces causes à ce moment-là, on risque de toujours l’être ». Il ne faut toutefois pas que les étudiants oublient qu’ils ont le droit à leur opinion, et le fait de dire ce que l’on pense ne veut pas nécessairement dire qu’on est raciste. « Les élèves sont ouverts d’esprit, mais ils sont surtout très lucides face à la situation, ce qui leur permet d’être plus objectifs lorsqu’ils abordent le sujet », a conclu cette dernière.
L’assistance a chaudement applaudi les participantes dont les œuvres ont été primées grâce aux 4 bourses offertes par Tolerance.ca® dans le cadre de son projet sur la diversité des valeurs et des croyances religieuses réalisé grâce à la contribution financière de Patrimoine canadien. Ravy Puth, Catherine White, Marie-Claude Lacerte ainsi que Mylène Lavoie furent les quatre boursières recompensées par Tolerance.ca®. L’équipe de Tolerance.ca® remercie également tous les autres participants, sans oublier Vincent Doré et Lucas Feraz qui ont offert une excellente performance musicale lors du vernissage.
N.D.L.R. Cégep est l'acronyme courant au Québec pour désigner les collèges publics (Collège d'enseignement général et professionnel).
Réviseure : Jocelyne Archambault.
Voir aussi les événements organisés au Collège Vanier et à l'Université de Sudbury.

Cet article fait partie d'une série sur la diversité des valeurs et des croyances religieuses dans les milieux collégial et universitaire réalisée grâce à la contribution financière de :
* Les étudiants participant à l’exposition « En couleurs » du collège de Saint-Laurent, en compagnie du professeur François La Bissonnière ((1e rangée, à gauche), du directeur de Tolerance.ca®, Victor Teboul, de Mme Ariane Bureau et de Mlle Véronick Talbot (2e rangée, respectivement à l’extrême gauche, au centre et à l’extrême droite). Photo : Guy Labissonnière.
** M. Victor Teboul, prenant la parole. Photo : Guy Labissonnière.
*** Mme Ariane Bureau. Photo : Guy Labissonnière.
**** L’assistance écoutant l’exposé d’une participante. Photo : Guy Labissonnière.
***** Mlle Mylène Lavoie, une des quatre boursières de Tolerance.ca®. Photo : Guy Labissonnière.