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Être Québécois : une question de «souche» ou de valeurs ?

par , collaboratrice, engagée dans le cadre de nombreux projets d'étudiants de Tolerance.ca
Vous devez tous être au courant du projet de loi 195 sur l’identité québécoise qu’a présenté madame Pauline Marois, députée de Charlevoix, le 18 octobre dernier. Pour ceux qui ne le sont pas, cette dernière propose la création d’une citoyenneté québécoise, à laquelle ne pourraient accéder que ceux qui maîtrisent le français et qui auront réussi un examen pour le prouver. J’aurais envie de demander à madame Marois si c’est sa faible connaissance de l’anglais qui lui fait craindre cette langue. Si je le pouvais, je lui dirais aussi qu’à mes yeux, mon identité repose davantage sur mes valeurs et ma culture personnelle, plutôt que sur la langue dans laquelle je parle et j’écris.

L’anglais au deuxième rang

Ce n’est pas uniquement au Québec que l’on parle anglais, même si les anglophones sont une minorité dans notre province. Après le chinois, l’anglais et l’espagnol sont les langues les plus parlées sur le plan international. Pas surprenant qu’on les enseigne dans les écoles et que les jeunes les maîtrisent de plus en plus! Lorsqu’on fait affaires à l’étranger ou qu’on aime voyager, on ne peut plus se passer de ces langues secondes et passe-partout, disons-le. Quand je voyage à Cuba ou au Guatemala, par exemple, je vois des gens parler anglais pour mieux se faire comprendre par les visiteurs. Je vois des Cubains et des Guatémaltèques s’exprimer dans une autre langue que la leur, avec leur accent d’une si grande beauté, leurs expressions et leur tenue qui les trahissent et témoignent de leurs origines.

Depuis longtemps, et c’est connu, il y a une division marquée entre les francophones et les anglophones au Canada, une division qui soulève la crainte et la haine. Je ne suis d’ailleurs pas surprise, d’après un sondage récent, que les Québécois francophones soutiennent majoritairement le projet de loi 195, même si ça me déçoit. À mes yeux, quand je parle anglais ou espagnol, ce n’est pas un rabaissement mais plutôt un enrichissement et une fierté. Et je suis convaincue que, pour plusieurs immigrants et Canadiens anglais, il en va de même lorsqu’ils font des efforts pour se faire comprendre dans notre si belle langue.

L’exception généralisée

C’est sûr, il y a des exceptions. Oui, certains anglophones ne font pas d’efforts pour parler le français, mais à vous voir aller, compatriotes francophones, vous êtes tout autant et même plus fermés qu’eux. Qu’est devenu le Québec multiculturel, reconnu internationalement depuis longtemps ? Qu’est devenu son peuple dont on vantait l’ouverture d’esprit? Cette si belle valeur, est-on en train de la perdre justement à cause de certaines exceptions mises de l’avant par les médias garants de sensationnalisme? Je ne vous donne qu’un exemple parmi plusieurs, mais après avoir fait la manchette pendant plusieurs jours, combien de femmes, croyez-vous, ont voté ou demandé de le faire le visage voilé? Aucune, selon mes sources, moins de cinq, assurément. On a soulevé votre colère pour rien, chers concitoyens. Même si je suis contre, je peux comprendre, avec l’accumulation de ce genre d’événements, que vous soyez de plus en plus craintifs envers les « autres ». Et je peux aussi comprendre que vous soyez en faveur du projet de loi de madame Marois, même si ça me déçoit.

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Évoluons !

Soyons réalistes un instant. Vous ne croyez pas, avec les lois pour la protection de la langue française et l’importance de celle-ci au Québec, que les immigrants, majoritairement, n’auront pas d’autre choix que de l’apprendre à un moment ou à un autre? Ne croyez-vous pas qu’ils sont déjà conscients de l’importance de parler français au Québec, sans qu’on ait besoin en plus d’une loi pour leur faire comprendre cela ? Ne seriez-vous pas déçus d’être privés des bonnes idées d’une personne seulement parce qu’elle ne maîtrise pas le français et qu’elle ne peut donc pas les mettre de l’avant sur la scène politique québécoise?

En ce sens, selon l’article 10 de la Charte des droits de la personne, «toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la langue». C’est d’ailleurs la raison pour laquelle madame Ginette L’Heureux, porte-parole de la Commission des droits de la personne, a annoncé vendredi dernier que l’organisme n’appuierait pas le projet de loi 195 : « Une personne ne pourrait pas être empêchée de se présenter aux élections parce qu'elle n'a pas une connaissance appropriée de la langue française. Car cette personne serait discriminée dans ses droits politiques» a-t-elle déclaré.

Évoluons! Le Québec a toujours été divisé à cause des deux principales langues qui y sont parlées, et l’anglais tout autant que le français fait partie de notre histoire. Néanmoins, ce projet de loi renforcerait davantage cette dichotomie dans la société, et fort probablement la haine et la crainte qu’elle engendre. Ce débat prend de plus en plus la forme d’un nationalisme populiste, et on oublie les « autres » pour ne se concentrer que sur nous. Je me souviens d’une superbe métaphore que j’avais entendue lorsque j’étais plus jeune, la « courte-pointe québécoise ». Je trouve l’image d’un Québec bâti grâce à des gens venant d’un peu partout tellement belle, et l’idée que ces personnes, peu importe leurs origines, veuillent s’investir pour faire grandir notre province, tellement réconfortante, que je ne peux pas m’empêcher de trouver regrettable le renfermement sur soi démontré ces temps-ci par les « purs » Québécois.

Je suis fière d’être Québécoise, mais surtout d’être une Québécoise ouverte d’esprit et reconnaissante que, quelle que soit notre origine, que nous soyons anglophones, francophones ou immigrants, si nous voulons nous investir pour construire une société meilleure, nous devrons être entendus et avoir droit au statut de citoyenneté québécoise s’il existe un jour, car, pour moi, être Québécois, ce n’est pas une question de langue, ni le fait d’être ou non de «souche», mais une question de valeurs, de ce qu’on a au fond du cœur.




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Au dela de la dualité linguistique
par mohamed a. le 10 novembre 2007

Je pense que l'appartenance a un pays,a une nation repose sur plusieurs piliers,mais,il faut savoir qu'a nos jours,les valeurs partagées,communes,sont plus importantes pour lier et soutenir l'harmonie et protéger les sociétés des facteurs de fissure,sans oublier que la langue joue un role a ne pas negliger dans ce théme,mais ce n'est pas pur autant le plus decisif.ce qui rattachent les gens,c'est les concepts humains,les idées et les aspirations,plutot qu'autres choses qui s'avérent superficielles.
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