Tolerance.ca
Directeur / Éditeur: Victor Teboul, Ph.D.
Regard sur nous et ouverture sur le monde
Indépendant et neutre par rapport à toute orientation politique ou religieuse, Tolerance.ca® vise à promouvoir les grands principes démocratiques sur lesquels repose la tolérance.

Qu’est-ce qu’un bon prof ?

par , collaboratrice, engagée dans le cadre de nombreux projets d'étudiants de Tolerance.ca
Qu’est-ce qui fait un bon prof? Sa formation? Ses connaissances? Ou ses capacités de communicateur? Selon plusieurs spécialistes, même si la compétence de l’enseignant est importante, il s’avère que ses habiletés en matière de communication le soient tout autant. En effet, même si l’enseignant connaît parfaitement la matière qu’il enseigne et qu’il en soit passionné, il faut qu’il soit apte à transmettre ses connaissances clairement et de façon structurée afin d’amener l’élève à les comprendre et à les intégrer.

Savoir communiquer sa passion

Pour M. Jean-Marie Bergeron, professeur de français au cégep* Lionel-Groulx, situé à Sainte-Thérèse, en banlieue de Montréal, le rapport de communication qui s’établit entre un étudiant et son professeur est un élément primordial. « Bien entendu, il faut être un très bon communicateur afin de pouvoir transmettre ses connaissances. L’acte d’enseigner passe nécessairement par une rencontre entre deux humains : le professeur et l’élève. Il faut être capable de créer un climat de confiance mutuelle afin de générer un espace propice à une démarche intellectuelle. »

Certains facteurs entrent ainsi en jeu. Selon M. Bergeron, l’apparence physique du professeur peut influencer l’attitude qu’un élève adoptera à son endroit : « Je crois que la question des apparences est très importante. Si j’observe mon évolution dans la profession, je dirais que, plus je vieillis, plus c’est facile d’obtenir le respect des élèves. J’accorde aussi une attention particulière au choix de mes vêtements, car c’est une question de respect envers eux. Sans céder aux pièges de la société de consommation, il est possible de déjouer la monotonie. Enseigner, c’est communiquer avec un groupe. Dans le rapport émetteur-récepteurs, certes, les apparences jouent un rôle non négligeable. »

Les visiteurs du site américain www.ratemyteachers.com, créé par le professeur new-yorkais M Michael Hussey, qui reçoit plus de 50 000 visites d’étudiants par jour, évalue les compétences des professeurs selon trois critères, dont celui de la clarté de leurs explications. Mais les enseignants sont aussi évalués pour leur bonne humeur et la tolérance dont ils font preuve à l’égard de leurs élèves.

Selon Josée Therrien, étudiante en sciences de la nature au cégep régional de Lanaudière, à Terrebonne, en banlieue de Montréal, « l’entrain du professeur est très important parce que c’est la première chose que les élèves vont remarquer de leur enseignant, et parce que le premier contact entre deux personnes est déterminant. La bonne humeur se manifeste aussi dans le ton de la voix du professeur, et il est beaucoup plus facile d’être attentif à quelqu’un qui a un ton enjoué et qui fait quelques blagues qu’à un enseignant qui s’exprime sur un ton monotone. » Si le professeur aime son métier, sa bonne humeur motivera ses étudiants. La passion qu’il entretient pour la matière qu’il enseigne éveillera aussi davantage leur intérêt pour le cours et stimulera leurs apprentissages. Les étudiants seront plus portés à aller lui poser des questions parce qu’ils savent que cela lui fera plaisir de leur répondre.

Selon M. Bergeron, « un bon professeur dérange, provoque, suscite par sa propre passion le désir d’apprendre et déclenche une curiosité intellectuelle qui appelle à un dépassement de soi, à une volonté de repousser les barrières de l’ignorance. »

Des valeurs reliées au dépassement de soi doivent faire partie de la formation des étudiants, soutient aussi M. Chouinard, spécialiste en éducation et en motivation à l’Université de Montréal. « J’essaie d’inculquer à mes étudiants la possibilité et la capacité de s’améliorer, de travailler avec les autres sans entrer en conflit, le souci de faire un bon travail, car ces éléments leur seront utiles tout autant dans leur vie personnelle que professionnelle », affirme-t-il.

La disponibilité du professeur contribue par ailleurs à motiver l’étudiant, précise M. Chouinard. « L’élève aime que l’enseignant soit présent pour lui, et qu’il prenne l’initiative de lui expliquer la matière d’une autre façon lorsqu’il ne comprend pas, sans rire de lui, sans faire preuve de sarcasme. »

Établir des consignes claires

Selon M. Chouinard, les étudiants aiment aussi « que les professeurs soient constants dans la charge de travail qu’ils leur donnent. » À l’école, les élèves acceptent d’être punis, ajoute-t-il, lorsque cela est mérité, mais ils « aiment que les règlements soient limpides et leurs applications justes. Cela signifie que les élèves s’attendent à ce qu’un professeur intervienne, mais en leur donnant une conséquence logique par rapport au geste qu’ils ont commis. Par exemple, les élèves vont préférer réparer un objet qu’ils ont brisé ou encore s’excuser plutôt que d’aller en retenue. »

M. Marcel Thouin, professeur à la faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal, évoque son expérience personnelle et souligne que l’autorité exercée par un professeur ne s’acquiert pas nécessairement en faisant de la discipline : « Certains professeurs obtiennent le respect en “ayant de l'autorité”. Je préfère obtenir le respect en essayant “d'être une autorité”, ce qui a une signification bien différente et qui veut dire en essayant “d'être quelqu'un de reconnu dans son domaine”. »

Il ne faut toutefois pas oublier que l’attitude de l’élève est aussi fondamentale dans le rapport qu’il entretiendra avec son professeur. Depuis quelques années, il est plus difficile de communiquer avec les élèves, constate M. Bergeron. « Je dirais qu’avec le temps, c’est plus difficile de capter l’attention des élèves. Ils arrivent au cours souvent très fatigués à cause des emplois qu’ils occupent et de leurs sorties. D’autre part, le sens de l’effort est moins développé qu’il ne l’était auparavant, à cause d’Internet et la grande présence des médias. En plus, la société de surconsommation incite à la facilité. Le cellulaire occupe aussi beaucoup l’attention. » D’ailleurs, pour plusieurs étudiants, l’école, aujourd’hui, n’est plus uniquement un lieu de transmission des connaissances mais aussi un cadre qui favorise des rencontres et où l’on organise diverses activités, ce qui rend les étudiants moins ouverts à l’apprentissage des connaissances. Les professeurs doivent donc apprendre à gérer ces nouvelles réalités, ce qui n’est pas toujours facile parce que celles-ci sont hors de leur contrôle.

Transmettre des valeurs citoyennes

Selon M. Chouinard, la majorité des professeurs aujourd’hui, peu importe à quel niveau ils enseignent, souhaitent inculquer à leurs élèves le respect de soi, de l’autre et de l’environnement.

Josée Therrien se souvient à cet effet de l’expérience qu’elle a vécue alors qu’elle n’avait que dix ans. « Mon professeur de religion nous avait confrontés à la réalité qu’il y avait, même à Terrebonne (une banlieue aisée de Montréal), des enfants qui arrivaient le matin à l’école sans avoir déjeuné, parce que leur famille n’avait pas les moyens. Nous avons donc organisé plusieurs événements afin d’avoir assez d’argent pour leur venir en aide. La fierté que j’ai ressentie à ce moment m’a beaucoup poussée à penser aux autres par la suite. »

Il s’agit, selon M. Bergeron, de transmettre « des valeurs citoyennes aux étudiants : le respect, la tolérance, l’ouverture à l’autre, le sens des responsabilités, la conscientisation à des réalités humaines, ainsi que le rapport à la différence, le goût du travail bien fait et le rôle essentiel du politique. »

Les professeurs se doivent d’agir conformément à cela et de traiter tous les étudiants sur un pied d’égalité. « Tous les élèves ont le droit, à mon avis, d’apprendre. Il s’agit de leur fournir les meilleures conditions possible à un apprentissage efficace. Je fais bien référence ici à des droits et non à des privilèges. Dans des cas d’exception, il faut à l’enseignant un soutien approprié, ce qui manque souvent dans le milieu scolaire », affirme M. Bergeron.

Qu’en est-il du temps que réservent les professeurs aux élèves moins doués, comparativement à celui alloué aux étudiants plus forts? Josée Therrien, qui a davantage de difficulté dans certains cours, explique qu’elle préfère que son professeur ne lui accorde pas plus de temps qu’aux autres, même si elle ne comprend pas bien la matière. « Le fait d’avoir beaucoup d’aide de la part d’un professeur me gêne parce que les autres remarquent cette attention. Je préfère demander de l’aide à mon copain, par exemple, qui réussit bien à l’école. Cela me gêne moins. » M. Chouinard confirme que la plupart des étudiants adoptent la même attitude que Josée Therrien, ce qui explique d’ailleurs la création de centres de tutorat dans les écoles secondaires et, plus souvent, dans les cégeps.

« Une question de respect, mais aussi de responsabilité »

Pour M. Neil Caplan, directeur du département des Humanities au collège Vanier de Montréal, être un bon prof signifie aussi la capacité d’inculquer le sens des responsabilités : « Une des choses les plus importantes, dans n’importe quel cours, c’est de transmettre aux élèves une sensibilité aux autres et des valeurs d’ouverture et de communication entre les individus. C’est non seulement une question de respect, mais aussi de responsabilité car beaucoup de gens ne voient pas le lien entre ce qu’ils font ou ne font pas et les conséquences de leurs actes. »

« Le contenu, la matière du cours est souvent secondaire à ce but pédagogique, ajoute M. Caplan. Probablement, les faits, les petits détails, appris pendant la durée de la session seront oubliés après la remise du dernier travail ou après l’examen final. Mais les bonnes habitudes d’apprentissage et de travail (y compris l’essentiel time-management) pourront durer toute une vie – surtout si elles sont renforcées par d’autres professeurs. »

Il y a plusieurs façons de conscientiser les étudiants à ces réalités, par le choix des ouvrages qu’on leur présente et par les travaux qu’on exige d’eux. Pour M. Bergeron, les travaux permettent aussi aux élèves, mis à part le fait de leur faire approfondir la matière enseignée, de « développer un esprit d’analyse et un sens critique, ce qui est fondamental. »

Le processus d’apprentissage quels que soient les résultats scolaires joue un rôle moteur en soi, selon M. Chouinard. « Il est important de faire saisir aux élèves qu’à l’école, tout le monde est gagnant et qu’il n’y a pas de perdants car tout le monde apprend. Tout le monde a ses forces, et c’est ce qui fait que le monde est aussi diversifié aujourd’hui. »

*cégep. Acronyme pour collège d’enseignement général et professionnel, établissement post-secondaire du Québec.

___________________

Pour en savoir plus :

GAUTHIER, Clermont, Qu'est ce qu'un bon prof? http://www.scienceshumaines.com/qu-est-ce-qu-un-bon-prof-_fr_14908.html


Cet article fait partie d'une série sur la diversité des valeurs et des croyances religieuses dans les milieux collégial et universitaire réalisée grâce à la contribution financière de :




* Daisy Chamberlain, 8 ans s'émerveille devant la reconstitution d'un volcan en irruption au Musée de la science, à Londres, en Angleterre. Image : Reuters

** M. Jean-Marie Bergeron, professeur au collège Lionel-Groulx. Photo : Pierre-Henry Reney.




Postez votre réponse
Réagissez à cet article !
Commentaire bis
par A.Terieur le 24 décembre 2007

Je pense qu'un bon prof c'est celui qui sait faire aimer la matière qu'il enseigne. La graine ainsi semée va inévitablement germer, puis sera entretenue, consolidée et optimisée au fil des années!
Commentaire
par mohamed a. le 21 septembre 2007

merci pour cet article;je pense que le point de vue exposé par l'article est vraiment le correct:un bon prof ce n'est pas celui qui offre à ses éléves des informations préfabriquées,mais qui leur apprend comment ils doivent s'autoformer,comment acquérir des capacités et compétences eux-mémes.
Poster votre réaction

L'envoi de votre réaction est soumis aux règlements et conditions de Tolerance.ca®.
Votre nom :
Courriel
Titre :
Message :
Analyses et Opinions
Suivez-nous sur ...
Facebook Twitter