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Dans l'expression « droits de l’Homme », nous retrouvons l’humain et l’humanité

par
Professeur, Faculté de droit, Université Laval, Québec, membre de Tolerance.ca®

Dans le concept des « droits de l’Homme », nous trouvons l’humain et l’humanité. C’est la valorisation anthropologique de l’individu qui accompagne ce système de privilèges politique, moral et (partiellement) législatif, et que représente, dans une perspective historique, l'aspect révolutionnaire. L’objectif de notre article, c’est de réfléchir sur l’individu ayant obtenu un privilège propre (droits) au fait d’être l’Humain.

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Apprêtons-nous à effectuer, philosophiquement, une descente architecturale explorant le sens anthropologique qui s’exprime par l’expression « droits de l’Homme ». L'objectif, c'est de comprendre cette expression, à la lumière d’un « privilège en faveur de l’individu » et d’une « protection de l’individu ». Ne cherchant, de ce fait, rien en « conceptuel » ou en « idée », qu’il s’agisse de politique, philosophique ou juridique, nos réflexions se situent en aval de toute appréciation abstraite. Nos réflexions ne témoignent que de notre ferme attachement en faveur d’une modernité à faire, à défaire, à refaire, se situant résolument à la hauteur de l’humain. C’est l’humain qui nous intéresse tous !

            Explorer le sens des droits de l’Homme

L’expression « droits de l’Homme » ne fait guère de sens qu’en tant que « privilège ». Nous pouvons certes utiliser des mots similaires comme « prérogative », « supériorité », « principe », « primauté », « préexcellence », « atout » (Ronald Dworkin), toutefois le mot « privilège » résume fidèlement tout ce qu’il a à dire. En tant que « privilège », le sens de ce mot se conjugue avec bonheur du mot de base, à savoir avec le mot « Humain », avec l’être humain, avec le privilège d’être quelqu’un.

Le générique de « l’être humain » a déjà une longue histoire, prête à nous instruire ! À l’époque hellénistique et dans l’antiquité romaine, l’humain était en premier lieu compris par son origine animalière, d’où s’ajoutaient ensuite différentes caractéristiques et distinctions propres à l’individu socialisé et personnifié parmi les siens. Observons de ce fait que Platon définissait l’humain comme un animal bipède sans plumes, ce à quoi avait fait réagir Diogène (le cynique) pour rapidement déplumer un coq et crier « Voilà l’humain de Platon ». Quand Aristote définissait l’humain, c’était en tant que « corps », à savoir comme organisme doté d’outils et composé de « fonctions ».

Si l’époque hellénistique insistait tant sur les différentes caractéristiques de l’animal « humain », elle focalisait également sur l’être personnifié et socialisé par la Cité (l’existence et l’âme), le statut (la lignée ancestrale) et la citoyenneté (appartenance – ou non - à la Cité). Quand les cyniques voulaient « chercher l’Homme », c’était la bonté, le courage, l’honnêteté, la droiture (et leurs absences) qui étaient en jeu.

C’est avec l’avènement du judéo-christianisme que tout cela change, se modifie très lentement, par l’introduction d’un générique universel pouvant concilier la nature et le culturel, l’esprit (âme) et le corps, l’individualité et la socialité ! Dans le miroir du Dieu judéo-chrétien, l’humain reflète l’universalité de toute humanité.

Le monde judéo-chrétien se développe au moyen d'une très lente transmutation culturelle et intellectuelle qui a duré deux mille ans (et plus) et qui n’est pas arrivée encore à terme. Il se renforce d’abord, timidement, pendant la période qu’on dénomme (de façon inappropriée) le Moyen-Âge, un Moyen-Âge qui n’était en rien « l’âge noir », comme le veut la mythologie moderne, sinon une période de changement culturel en profondeur, une période qui introduit culturellement le générique « humain » (humanité) et qui le hisse au premier rang. L’accession de l’être humain, c’était dans le monde judéo-chrétien, l’emphase sur l’humanité de l’humain (toujours menacée par l’antihumanisme) comme étant désormais la plus importante sur notre terre, plus importante que les empires, les principautés, les villes, les nations, les cités.

Le christianisme remplace « l’être compris à l’intérieur de la cité », par l’être humain compris à l’égard de tout être humain. C’est l’avènement du « inter hominis esse » (être parmi les humains), à savoir l’insistance que « mon visage » c’est aussi « ton visage », que mon « universalité » c’est également ton « universalité ». En d’autres mots, « être humain », c’est de vivre en humain avec les humains ! C’est un « inter hominis esse » qui reconfigure notre compréhension du zoon politikon antique, qui le déplace vers l’universalité, vers une universalité où l’humain apparaît toujours comme un humain pour autrui.

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Nous retrouvons le nouveau zoon politikon inter hominis esse (être un animal politique parmi les humains) dans la culture intellectuelle de Saint-Augustin à Saint-Thomas, et chez d’autres intellectuels par la suite. La renaissance intellectuelle inaugurée à partir du 11e siècle se construit (et se comprend) par et au profit d’un individu appartenant à la societas humani generis (la société universelle du genre humain).

                        Un souci en faveur de l’humain

Retrouvons maintenant le sens que nous attribuons aux « droits de l’Homme ». Examinons l’établissement d’une légitimité et un souci en faveur de l’humain, un souci en faveur de l’individu, un souci à l’égard de l’humanité de l’humain. S’exprime de la sorte un souci anthropologique quant à la vulnérabilité de l’humain, de sa fragilité; s’exprime un souci humanitaire face à la férocité, la cruauté, la sauvagerie, que l’humain peut diriger contre autrui, que l’humain peut être acteur du « mal ». Le mal fait partie de la condition humaine, là où il y a des humains, il y a de l’hommerie, il y a du mal.

Soulignons que là où la nature ne recèle aucun « mal », le mal fait partie de l’univers humain, c’est une pulsion, une inclination, une volonté ! Le mal, c’est ce que l’humain fait à l’humain, c’est l’œuvre de l’humain et le signe de l’inhumanité. Faisant partie intime avec la condition humaine, le mal, c’est la propension au mal, à faire du mal, et à éprouver le plaisir d’infliger du malheur, de la douleur, de la peine à l’autrui ! Le mal, c’est de réduire l’autre à n’être qu’un objet, à n’être que la chair par laquelle le maître (et la maîtresse) se sert pour obtenir du plaisir pour lui (elle). La condition humaine englobe la volonté d’exploiter et de faire du mal à l’autre, c’est l’individu en tant qu’« être particulier » qui fait du mal et qui l’endure également.  

Quand Saint Paul confirme : « je ne fais pas le bien que je veux et je fais le mal que je ne veux pas» (Rom. 7:19), il a raison. Le mal accompagne la faiblesse de la volonté (acrasie) comme l’ombre suit l’humain, et nous pousse à agir « mal » en même temps que nous ne voulons pas ce mal en résultat. Le mal se fait par l’individu à cause de l’orgueil, l’insolence, la stupidité, la fierté, et à cause de toutes les singularités de l’acteur humain. Le mal fait surtout mal, car l’autrui est « cassable », à la façon d’un vase en argile, et c’est souvent difficile de se défendre. Et l’on peut se briser autant par un choc émotionnel que par une agression venant de l’extérieur.

Se confirme en toute simplicité que l’humain peut à la fois être le Loup et l’Agneau ! Et nous ne savons jamais, a priori, à qui nous avons affaire, nous ne le découvrons que trop tard ! Hélas, notre humanité risque à tout moment de nous trahir, de nous amener à notre perte.

            La vulnérabilité humaine

La vulnérabilité humaine constitue un thème fascinant. C’est comme installer un miroir où chaque individu peut se contempler, se « voir » soi-même, et par ce procédé, comprendre qu’il n’est pas comme les autres, qu’il est vulnérable et que personne ne sait d’avance ce qui peut se produire dans sa vie. C’est se voir égal à tout autre humain.

La vulnérabilité de l’humain ne se résume en aucune façon à une formule unique. Nous sommes vulnérables différemment, toujours au singulier, chacun à sa façon et chacun avec ses forces et ses faiblesses. Cela se constate aisément quand nous comprenons que la vulnérabilité d’un individu ne se résume guère à une quelconque nature, mais réside entièrement dans une dialectique entre l’individu et l’espace cosociétaire. Chaque individu négocie comme il le peut avec sa propre vulnérabilité et quelques-uns négocient mieux que d’autres. Certains négocient tellement mal leur vulnérabilité qu’ils tombent, qu’ils se font mal, qu’ils se blessent, et hélas, deviennent des proies faciles pour les prédateurs humains.

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Les anthropologues (particulièrement les anthropologues philosophes) affirment haut et fort que la vulnérabilité de l’humain s’explique d’abord par les caractéristiques biologiques, physiques, par l’humain en tant qu’animal. Ils soulignent que tout nouveau-né qui rejoint l’humanité n’a pas la capacité de survivre sans accueil. Sans accueil, tout nouveau-né périt rapidement, ne laissant aucune trace. Toutefois, la sphère humaine offre normalement un accueil favorable à tout nouveau-né et ouvre une socialisation et une personnification qui forment l’individu en un être humain conscient d’être là, et de l’être politiquement et socialement. Il est normal d'être vulnérable, nous le sommes tous, car l’invulnérabilité est une illusion, une erreur de compréhension, une fausseté et un orgueil prêt à nous faire trébucher.

La vulnérabilité de l’humain ne nécessite en conséquence nullement une protection en soi, tant que tout individu est responsable de sa conscientisation à l’égard de sa propre vulnérabilité. Si une telle conscientisation nous tient éveillés, il ne demeure pas moins vrai que l’humain peut facilement devenir l’objet de prédation, de l’exploitation, de l’abus, de tromperie, de débauche. C’est attristant de constater avec quelle ingéniosité l’humain fait de l’individu sa proie, comment l'humain objectifie l’autrui, le chosifie, pour faire de lui (et d’elle) une gratification à son profit unique ?

En abordant la problématique du « mal » que l’humain inflige à l’humain, rien ne l’illustre aujourd’hui plus atrocement que le fait terroriste.

Par sa bestialité, sa cruauté, son inhumanité, le terrorisme contemporain, dans toutes ses variantes, incarne la vacuité où loge la conscience tétanisée d’une partie de nos concitoyens. Hélas, car le terrorisme fait mal, terriblement mal, il brise et il détruit, pour rien, pour des gloires sans lendemain, pour que les pleurs et les malheurs se répandent, pour gaspiller la vie de l’un et terroriser la vie de l’autre. Après la désolation due au terrorisme, c’est la terre brûlée où rien ne pousse et où s’accumulent les cendres de ceux qui étaient « de trop » !

Il se peut que le mot même du « terrorisme » soit à présent de trop! Peut-être que le mot « massacrisme » (tuerie-massacre) serait le plus approprié, car il s’agit de cela, de faire accumuler autant de cadavres les uns sur les autres pour que la terreur se loge dans l’esprit de tout le monde et glace toute résistance. Le massacrisme contemporain, en ce sens, a jusqu’ici été exemplaire par sa cruauté, par ses meurtres en masse, par l’indifférence dans ces exécutions, par l’instrumentalisation de vies humaines ou simplement par l’absence entière et cruelle d’humanité. Une massacrisme au plein sens du mot : tuer avec sauvagerie et indifférence des êtres qui ne peuvent pas se défendre. Tuer pour terroriser, pour mettre à genoux et pour effacer pour toujours tout espoir de vivre libre. De fascisme brun au fascisme islamique, c’est la même mélodie de malheur qui se répand, c’est la volonté de stupéfier les gens d’effroi et de peur, de les frapper d'apoplexies, de verser le sang des innocents, de répandre la peur chez les gens.

Il y a des gens qui ne croient pas au « mal », qui préfèrent fermer les yeux, qui inventent et avancent des excuses, qui s’enfoncent dans des justifications qui n’ont guère d’autre fonction réelle que de faire d’eux des complices et des idiots utiles. C’est l’autre versant de ce « mal », où tant de gens se foncent dans l’aveuglement et l’obscurantisme. Mieux pour l’humain et à l’humanité, c’est de dire non, de tracer la ligne, de prononcer un ¡No pasarán! et surtout de s’engager tous ensemble contre le mal que l’humain inflige à l’humain.

            Le Loup et l’Agneau

Nous l’avons affirmé, l’humain peut à la fois être le Loup et l’Agneau! Thomas Hobbes n’a pas entièrement tort quand il écrit que « l'humain est un loup pour l'humain » (Homo homini lupus est). Là résidera une vérité, une vérité qui nous rappelle que l’humain peut être le pire ennemi de son semblable. C’est toutefois également « une vérité » amputée, fausse et incorrecte, une vérité qui ne concerne que quelques individus singuliers et des individus perdus dans cette singularité. Réaffirmons de ce fait la priorité accordée à l’individu ordinaire, la priorité quant à l’individu en chair et en os qui marche dans les rues, qui joue dans les parcs, qui rit et qui pleure, et qui respecte l’universalité de tout être humain.

Et la particularité de l’humain concret, l’individu en chair et en os, c’est qu’il se confirme lui-même ainsi. Il sait qu’il est « fragile et vulnérable », il sait qu’il doit se protéger et se défendre, il sait surtout que tout cela dépend de lui, toujours de lui et de personne d’autre. Il n’est pas seul, car le zoon politikon humain n’est jamais vraiment seul, il vit avec les autres, il dépend d’eux et il a besoin d’eux.

La politique humaine, c’est de toute évidence une politique de l’humain en pluriel, ce qui nous chemine vers l’altérité comme préalable pour toute action concertée, mais aussi vers l’étincelle que pourra éventuellement libérer une cosocialité solidaire.

            Une solidarité que produisent les individus libres

Or, en prononçant le mot « solidarité », on observe inéluctablement que le mot évoque trop de mauvais souvenirs et un lourd passé de souvenirs politiques de « joug » et de « knout ». Que de crimes ont été faits en ton nom !

Car il est vrai que le mot a été utilisé pour manipuler, soumettre, embrigader, manœuvrer et surtout pour tromper ! Utilisé, autant par la gauche que par la droite, le mot a simplement récolté la mauvaise réputation d’être la chape de plomb d’un totalitarisme politique et moral, et le signe d’aveuglement et de sectarisme sous l’auspice du « politiquement et le moralement correct ». Si nous rejetons fermement la fausseté fonctionnant sous le mode de « l’embrigadement solidaire » ou par l’idée d’un « devoir de solidarité », il demeure toujours la possibilité d’une solidarité sous forme d’une ressource produite par des individus libres et autonomes. Se concrétise, éventuellement, que les individus tissent, directement ou indirectement, des liens solidaires avec d’autres individus, des individus qui l’entourent et surtout avec ceux qu’ils ne connaîtront jamais vraiment.

C'est dans la famille (ou son substitut) qu'empathie, sympathie et solidarité se développent. Nous apprenons dans le petit cercle familial et « privé » l'importance de l'humain, l’importance de nos amis, de nos connaissances et de tout un chacun. La famille (ou son substitut) demeure le substrat où s'élaborent des expériences du « moi, des autres et du nous », où se forment nos capacités de solidarité, où se créent nos « ressources individuelles » pouvant éventuellement être engagées en faveur d’autrui. Ce premier cercle pourra ensuite être prolongé dans la formation de l'individu par la communauté, puis par la région, par l'État-nation, enfin par le Monde.

L'individu, dans la formation de son « moi », apprendra l'importance de l'humain à toutes les échelles de l'environnement humain. Il comprendra qu’il a besoin d’autrui, qu’être deux est plus fort que celui qui se trouve seul, et que trois est encore plus fort que deux.

            Une solidarité solidaire

Admettons que nous n’entrons dans le monde du « je », « tu », « il et elle », etc., que par l’intégration sociale, par la personnalisation et la socialisation.

Nous pouvons concevoir la solidarité comme issue d'un processus de formation individuelle qui tourne autour de l'apprentissage du rôle et de l'importance de l'humain « pour moi, pour les autres et pour nous ». La solidarité est issue d’un processus de socialisation et de personnification propre et unique à chacun de nous. Quand l’humain épaule l’autre, l'humain se construit une digue en faveur de l’humanité de tous. Il se forme une digue de solidarité avec tous ceux qui, à partir de notre jugement autonome, ont réellement besoin de notre solidarité. C’est un jugement en autonomie qui repose sur notre faculté d’apporter un appui de solidarité en faveur d’autrui. La solidarité libère un souci en faveur de l’individu.

Car la solidarité, c’est bien évidemment une politique, une politique dans le sens premier du mot : une politique de prise de parole, une prise de parole solidaire et qui thématise le fait de vivre ensemble. Une politique où l’individu s’adresse, dialogue aux autres en sollicitant leur opinion, leur guidance, leur soutien.

            L’autonomie humaine

S’engager par le fait de « prendre la parole », c’est l’aube de l’autonomie de l’individu, car ainsi s’ouvre la possibilité de parler pour soi et d’éloigner, autant que possible, l’hétéronomie ambiante. L’autonomie, c’est de penser par soi-même, penser avec les autres, penser sans peur publiquement au profit de l’universalité. L’autonomie sert comme protection de l’individu, protection l’opposant autant contre les forces de soumission que contre sa propension de se plaire dans « sa servitude », d’aimer ses chaînes en fer, d’aimer la soumission.

L’autonomie n’est pas une donnée, mais une capacité permettant à l’individu de se rendre autonome, de conquérir individuellement son caractère d’indépendance, c’est le moment de se fabriquer soi-même comme son « propre législateur ». En opposition à la solitude kantienne de l’autolégislation, qui se révèle vite une impasse par la non-communication avec autrui, là où il faut comprendre autant l’autonome qui se forge autant par la personnification et la socialisation individuelle que par l’interaction démocratique, de la façon des cosociétaires de vivre avec les autres, formant un zoon politikon propre, avec une mentalité qui s’engage avec les autres et qui s’ouvre sans gêne à l’utilisation de « l’espace public ».

L’autonomie de l’individu s’apprécie surtout dans les contextes « politiques », « démocratiques », « sociaux », « économiques », « anthropologiques », car ils développent des prémisses propres relevant d’un individu apte à authentiquement dire « je ». Comprise telle quelle, l’autonomie de l’individu se conçoit entièrement en tant qu’autonomie exercée, pratiquée et confirmée. L’autonomie relève de l’existence politique et sociale de l’individu et nécessite dans ce sens des espaces publics pour exprimer en liberté cette autonomie.

L’espace public fonctionne de la même manière qu’une caisse de résonance apte à repérer des problèmes, des inquiétudes, des difficultés qui préoccupent les gens. Semblable à un système d’antennes sensibles, l’espace public sert, à l’échelle de la société, à identifier et à mettre des mots sur ce qui ne fonctionne pas ou fonctionne mal. Toute forme de prise de position argumentative n'étant pourtant guère autre qu'une « proposition » soumise à notre approbation ou à notre désapprobation, d’où la nécessité d’assurer que l’espace public devienne accessible à tous et qu’il serve à exprimer fidèlement les opinions de tous, sans restriction, pareil à un « tohu-bohu » anarchique. De là également l’importance de l’espace public pour nous signaler et débusquer les menaces qui représentent les pouvoirs d’hétérogènes.  

            Les affaires humaines et la raison pratique

Notre descente anthropologique et philosophique dans les « droits de l’Homme » nous mène où en fait ? Indubitablement à retrouver l’individu, à l’accompagner dans le fait de l’être et à affirmer qu’il faut écarter toute instrumentalisation ou l’objectification de l’être humain. Dans nos interactions humaines, nous avons besoin de jugement, de l’intelligence de la situation et de l’éclairage qu’apporte la raison. Nous avons besoin d’un jugement pratique qui assiste l’individu en chair en os et qui refuse de s’imposer en hétéronomie.

La raison pratique nous sert bien, elle oriente au mieux notre jugement vers ce qui sert authentiquement les humains, elle favorise notre concrétude en tant qu’individu (en chair et en os). Elle met l’accent particulièrement sur le fait que l’individu partage inéluctablement l’espace public avec d’autres individus.

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27 juillet 2023



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Analyses et Opinions
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La Chronique de Bjarne Melkevik
par Bjarne Melkevik

Bjarne Melkevik, docteur ès droit de Paris II, professeur à la Faculté de droit de l’Université Laval (Québec), est un auteur prolifique dans le domaine de la philosophie du droit, de l’épistémologie et de méthodologie juridique. Ses plus récentes publications incluent... (Lire la suite)

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